Laurent Devèze « La francophonie est un étendard pour la reconnaissance des cultures du Sud »
Quel bilan pouvez-vous tirer de la célébration de la journée internationale de la francophonie organisée par l’Institut Français de Stockholm le 20 mars dernier ?
Un bilan enthousiaste bien sûr ! Non seulement 2500 personnes se sont pressées à l’Ifs, c’est-à-dire environ 1000 de plus que l’an dernier, mais peut-être faut-il ne pas considérer que ce seul bilan quantitatif. En effet, de nombreuses personnes ont trouvé le chemin d’Östermalm ce soir-là, des jeunes de banlieue que l’on ne voit pas si souvent de ce côté-ci de la ville, et la raison de ce brassage social c’est la francophonie ! Je n’en suis pas peu fier car c’est l’une des leçons francophones que j’ai retenues d’Edouard Glissant : « la francophonie, c’est la possibilité du Toumonde face à une globalisation trop souvent vécue comme un imperium ». Et le Toumonde métissé, créolisé c’est d’abord « tout-le-monde », personne ne doit se sentir exclu a priori d’une telle célébration.
C’est à croire que Stockholm regorge d’une grande communauté francophile friande de diverses expressions culturelles ?
Oui, et ce fut pour nous une découverte l’an dernier, lorsqu’on a renoncé au « banquet V.I.P. » pour une fête de plus grande ampleur. Nous le soupçonnions, bien sûr, mais peut-être pas à ce point-là !
Réfléchissons tout de même au succès croissant que rencontrent les festivals Clandestino à Göteborg ou Selam à Stockholm, les programmations du Södra Théâtre ou encore le festival du film africain que nous soutenons. Africa Remix a, je crois, battu tous les records d’affluence du Moderna Museet. Cela veut sûrement dire quelque chose qui dépasse les seules limites de la francophonie. Celle-ci — et n’est-ce pas l’ambition de votre site ?— est aussi une sorte d’étendard pour la reconnaissance des cultures dites du Sud et le public est toujours, toujours en Suède en tout cas, au rendez-vous.
Cette grande attraction vous donne-t-elle des idées en ce qui concerne la création d’un véritable cadre d’expression culturelle francophone ?
Cela confirme, je crois en tout cas, notre ambition de faire de l’Institut Français, l’institut francophone ! En invitant le théâtre contemporain d’un José Pliya ou Simon Ndjami à présenter la photographie en Afrique ou encore en improvisant une visite d’ «Africa Remix» par le romancier Eugène Ebodé, ou même en travaillant dans le cadre européen à la célébration avec l’Institut Roumain d’un grand peintre lithuanien vivant à Paris, Pränas, nous nous « positionnons », comme on le dit aujourd’hui, comme un pôle francophone de référence culturelle de Stockholm, non?
Y a-t-il eu des difficultés liées à l’organisation de cette journée quand on sait que le cadre alloué à cette célébration s’est finalement avéré très exigu ?
Je pourrais répondre qu’il n’y a pas eu plus d’attente ce soir là à l’Institut que dans la plupart des grands clubs de la ville le vendredi ou le samedi soir et personne, là, ne s’en émeut. Cela mériterait réflexion ! Mais, bien sûr, nous nous posons des questions logistiques : quelle formule nous permettrait à la fois de rester dans les murs mais également de satisfaire les différents publics… Nous songeons pour l’an prochain à diverses formules mais, encore une fois, rappelons que notre problème aujourd’hui est de gérer un trop grand afflux de public, c’est une question qui, hélas ! ne se posait pas vraiment ces dernières années m’a-t-on dit… Alors réjouissons nous d’avoir de tels soucis !
La promotion de la francophonie dans l’espace culturel s’étend-t-elle à d’autres activités chez vous à part la journée de la francophonie ?
À vrai dire, toutes. Les conférences scientifiques elles aussi participent de la meilleure connaissance de l’espace francophone !
Enfin, et nos nombreuses collaborations avec le Québec ou la Suisse dans le secteur éducatif et linguistique en témoignent tout autant que la constance de notre travail avec la Belgique et la région wallonne en particulier, la francophonie est aussi une affaire européenne, un enjeu considérable au cœur de l’Europe même et ce d’autant plus que de nombreux « nouveaux » entrants sont membres de l’Organisation Internationale de la Francophonie.
Pouvez-vous, en quelques mots, nous présenter l’Institut Français et sa mission réelle en Suède au niveau de la culture ?
En hors-les-murs, il s’agit d’accompagner tous les échanges conçus, souhaités, voulus par les réseaux professionnels de nos deux pays et de l’espace francophone, rien de moins ! Mais il faudra interroger Alexandre Defay, le grand patron de l’établissement, sur ses ambitions, je suis sûr qu’il vous dira tout