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France: La suppression de l’ENA par Emmanuel Macron

Arsene DOUBLE | | Société

Le Président français Emmanuel Macron

Dans quelques heures, le Président français Emmanuel Macron annoncera la suppression de l’École nationale d’administration (ENA). Cette décision traduit la volonté du Chef de l’Etat de diversifier les profils de la haute fonction publique.

 

A l’occasion de la Convention managériale de l’État, le Président Emmanuel Macron présentera, par visioconférence, les grandes lignes de la réforme de la haute fonction publique, dont l’annonce la plus forte – et qui fera le plus réagir – sera la suppression de l’ENA. Cette fabrique à élites cessera dès ce soir d’exister.

Créée en 1945 par le général de Gaulle, l’ENA est régulièrement critiquée pour sa formation d’élites « hors sol », « déconnectées du réel ». Quatre des six derniers présidents de la République, dont Emmanuel Macron, sont issus de cette école, installée à Strasbourg depuis 2005, tout comme de nombreux ministres et élus.

Un travers amplifié par la crise sanitaire du Covid-19 durant laquelle l’administration française a été accusée d’être à l’origine de réponses de l’État souvent jugées lentes et inefficaces, en particulier sur la question des masques, des tests, de la campagne de vaccination ou, exemple peut-être encore plus parlant, des attestations.

« Même si tous les défauts de gestion de la crise ne lui sont pas imputables, la haute fonction publique est clairement responsable d’un certain nombre de maux. Mais le problème, surtout, c’est qu’elle n’est jamais coupable. Quand elle commet des fautes, il n’y a jamais de sanction, le principe de responsabilité ne s’applique jamais pour elle », fustige Chloé Morin, ancienne conseillère à Matignon de Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls, auteure de « Les Inamovibles de la République » (Fondation Jean Jaurès / Éditions de l’Aube, 2020), contactée par France 24.

 

Fin de l’affectation directe aux grands corps de l’État

L’objectif de cette réforme, préparée depuis plusieurs mois par la ministre de la Transformation et de la Fonction publique, Amélie de Montchalin, est donc « d’offrir aux Français un service public plus proche, plus efficace, plus transparent et plus bienveillant », explique l’Élysée.

En ce sens, l’une des mesures phares que devrait annoncer Emmanuel Macron, selon Le Monde, sera la fin de l’affectation directe aux grands corps de l’État (Conseil d’État, Inspection générale des finances, Cour des comptes) pour les élèves les mieux classés à l’issue du cursus. Tous les diplômés seront à l’avenir des « administrateurs de l’État » qui devront faire leurs preuves sur le terrain, en préfecture ou dans les administrations.

« Les énarques rejoignant directement les grands corps, c’est devenu notre nouvelle aristocratie, juge Chloé Morin. Voir des jeunes gens accéder aux plus hautes fonctions et avoir une carrière toute tracée simplement parce qu’ils ont réussi un concours n’est plus acceptable dans notre société. »

Cela suffira-t-il pour changer la culture et le fonctionnement souvent jugé trop fermé des grands corps de l’État ? Modifier des réflexes qui ont mis plusieurs décennies à s’installer ne se fera pas d’un coup de baguette magique. D’autant que ceux-ci ont aussi été façonnés par la longue tradition d’un État jacobin et d’une culture très centralisatrice et très verticale.

 

Nouveau mode de recrutement

Emmanuel Macron aura également à cœur d’insister, jeudi après-midi, sur la diversité des profils des étudiants qu’il espère obtenir avec un nouveau mode de recrutement. Le 11 février, lors d’un déplacement à Nantes, le chef de l’État avait insisté sur la nécessité d’ouvrir les prestigieuses écoles de l’administration à des jeunes d’origine modeste afin que plus « aucun gamin dans notre République ne se dise : ‘ce n’est pas pour moi’ ». Il avait alors dressé un constat sombre de « l’ascenseur social » français, qui « fonctionne moins bien qu’il y a 50 ans » car la mobilité « est très faible ».

« L’ENA a aujourd’hui un recrutement d’élites sociales avec des élèves principalement issus de Sciences-Po Paris », regrette Damien Zaversnik, président de l’association La Cordée, une association de promotion de la diversité sociale dans les secteurs publics et parapublics, contacté par France 24. « Quand on n’a pas dans son entourage des personnes pour nous apporter les codes très spécifiques attendus lors des épreuves, c’est impossible », ajoute-t-il.

Arsène DOUBLE

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