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En attendant les funérailles d’Allah Thérèse, quelle est l’ambiance à Konankokorékro ? Les proches de la diva de la musique baoulé entre doute et espoir…

Raymond Alex Loukou | | Société

Dimanche 1er mars, par un temps d’après-midi ensoleillé, nous avons décidé de prendre la route de Konankokorékro, histoire de nous enquérir les nouvelles relatives aux funérailles d’Allah Thérèse, la diva de la musique tradi-moderne baoulé. Un taxi-brousse est vite trouvé, et le cap est mis sur ce bourg où le couple d’artistes a toujours vécu. La poussière ambiante et la route caillouteuse n’auront pas raison de notre détermination à accomplir ce « pèlerinage ». En moins de 30 minutes, nous voilà à Konankokorékro. M. Brou qui fait office de manager local décide de nous recevoir dans la concession de la défunte selon les rites en la matière.  À quelques pas de là, des sonorités musicales nous parviennent. Nous pensions que l’heure était au recueillement. Renseignement pris, on nous fit savoir que c’est le baptême d’un enfant qui avait cours. Comme quoi, la mort ouvre toujours l’horizon de la vie et le passage de témoin entre l’artiste et ce nouveau-né en est la symbolique.

Brou le manager, le visage atterré ne cache pas sa peine devant le grand vide laissé par la disparition de sa « maman « . « La mort de maman est un coup dur pour nous ses proches et particulièrement pour moi. Je ne pouvais pas imaginer que ce petit malaise dont elle se plaignait pouvait déboucher sur la mort. Nous sommes à présent orphelins », déclare-t-il péremptoire. À l’en croire au-delà d’être artiste, Allah Thérèse était pour lui l’arbre tutélaire contre lequel il s’est toujours adossé. Maintenant qu’elle a rendu l’âme, il voit son destin chamboulé. Nous sommes invités à nous rendre sur les lieux du baptême après les échanges de civilités. Des décibels à rendre sourds nous accueillent. Nous sommes dans la cour de la famille Oka Yao. Un comité d’accueil sacrifie à la tradition en échangeant les civilités avec nous. Le porte-parole s’est dit très honoré de notre visite. Cela témoignage, a-t-il dit de l’intérêt que la presse accorde à leur « baobab ».

Nous sommes invités à partager le repas et la boisson servis à l’occasion. Le représentant de la famille Oka nous fit savoir que la cour dans laquelle nous nous trouvions a été le tout premier point de chute d’Allah Thérèse lorsqu’ elle a quitté son village natal ( Gbofia ) pour venir épouser Ngoran Laloi à Konankokorékro. C’est dans cette famille donc que la chanteuse a commencé ses premières prestations. La vieille Angbe Yao Yvonne s’en souvient comme si c’était hier. « Allah était ici en famille. Je l’appelais affectueusement petite-sœur. Nos rapports étaient très filiaux. C’est une grande perte pour la famille Oka je puis vous le dire », fit-elle entre deux sanglots vite étouffés par un geste machinal. Même son de cloche chez Nguessan Faustin, artiste-percussionniste qui a été l’un des collaborateurs des plus fidèles de « Mallah Thérèse « . « En ce moment je suis un homme perdu. Je ne crois toujours pas à la mort ma « patronne ». C’est le socle sur lequel ma famille s’appuyait. Elle m’a donné des terres à cultiver et scolarisé mes enfants. Je suis dévasté par sa mort … ». Sans commentaire !

Tout au long des échanges, nous avons compris que la disparition de l’artiste a jeté l’émoi dans tout le village. Des enfants aux personnes âgées en passant par les jeunes, tout le monde est unanime pour reconnaître qu’Allah Thérèse a été la star qui a fait connaître le nom de ce modeste village à travers le monde entier. Rien que pour ça, tout le village est prêt à lui rendre un hommage mérité pendant ses funérailles. Pour l’instant, le vœu le plus ardent des populations c’est que l’étoile de Konankokorékro soit enterrée auprès de son défunt mari Ngoran Laloi selon sa dernière volonté. Espérons que son village natal ( Gbofia ) et  le village de son  compagnon ( Konankokorékro ) trouvent un terrain d’ entente pour le repos de son âme…

 

Raymond Alex LOUKOU,  envoyé spécial à Konankokorékro.