Le faux départ
Notons pour la petite histoire qu’à Ouagadougou (capitale du Burkina Faso), le Roi des Mossi organise tous les vendredis une rencontre pour entretenir la vie du palais. Ce rassemblement hebdomadaire, hautement culturel et solennel est appelé le faux départ du Moro Naba à la recherche de la femme mythique qui est partie à La, le village où elle habite, selon la tradition orale.
Une musique narrative est mise en jeu par les sons saccadés obtenus à l’aide d’un dodo dont la rythmique plante dans la cour royale le décor de l’arrivée du Moro Naba, sur son cheval blanc. Deux autres dodo opérant le même jeu rythmique font office d’acclamation du peuple. Le dernier dodo, soliste, réservé au discours du roi, développe le message conducteur. Entrelacs constitués de sonorités de roulement des baguettes flexibles sur les cordes tendues des arcs musicaux et d’ostinatos rythmiques ternaires étroitement liés au système respiratoire des êtres humains, le discours musical se développe dans un continuum sonore où les césures indiquées par le joueur du dodo soliste marquent la ponctuation du message livré par le roi et font redémarrer l’événementiel sonore. La fin du morceau en decrescendo donne un air de renouvellement à la cérémonie, indiquant son caractère nostalgique et périodique.
Cette musique mythique et emblématique a été magistralement exécutée, en 2000 à Beijing lors du banquet offert par les autorités chinoises pour clore le « Colloque sur les Echanges Culturels Sino-Africains au Nouveau siècle ». A cet important évènement international, l’occasion a été offerte aux participants de diverses contrées de l’Afrique et aux partenaires chinois de découvrir et d’apprécier presqu’à l’unanimité, ce volet du riche et inépuisable patrimoine culturel du Burkina et de l’Afrique.
On n’a pas toujours le privilège de déguster à un tel délice musical. On est en droit d’en redemander.
Olivier Yro