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INTERVIEW Rokia Traoré :  « Ma carrière a commencé par une consécration »

Jean Marc Kouassi | | Musique

Née le 24 janvier 1974, Rokia Traoré est issue d’une famille malienne plutôt instruite. C’est grâce aux nombreuses affectations de son père à l’étranger que cette fille de diplomate s’imprègne de différentes cultures. La musique est autour d’elle dès sa tendre jeunesse : son père est amateur de saxophone et son frère aîné un collectionneur averti de disques vinyles… C’est au lycée de Bamako qu’elle fait ses premiers pas, en tant que chanteuse, avant que le grand public ne la découvre sur les antennes de l’ORMT (Office Radio Télévision du Mali) avec sa guitare chantant ses premières ballades. Elle se décide réellement à s’engager dans une carrière professionnelle en 1996, à l´âge de 22 ans.

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Pouvez-vous nous parler des débuts de vôtre riche carrière ?
J’ai débuté en tant qu’amateur. Je ne pensais pas qu’un jour, je serai professionnelle et puis, un concours de circonstance a fait que, j’ai eu l’opportunité de tenter ma chance en tant que professionnelle. De fil en aiguille, c’est parti.

Aviez-vous eu la chance de côtoyer certains artistes africains ou européens avant d’arriver au stade où vous êtes aujourd´hui ?
Non, j’ai plutôt eu un producteur qui m’a beaucoup permis de tourner et comme je fais de la “world music”, le moyen le plus sûr de se faire connaître, c’est de tourner et cela m’a permis de rencontrer des artistes que je n’ai vraiment pas côtoyé.

Justement, à propos de tournées, vous tournez plus en Europe et aux États-Unis qu’en Afrique votre continent d’origine. À quoi cela est-il dû ?
D’abord, j’ai été découverte à la télé au Mali et ensuite j’ai eu l’opportunité de me faire produire par une maison de disque française qui s’appelle le “Label Bleu”. En général, mes tournées sont bookées sur un an. Cela me permet de mieux m’organiser. Malheureusement, en Afrique les organisateurs font des propositions une ou deux semaines avant et cela fausse mon planning de travail. C’est la raison pour laquelle je joue rarement en Afrique. Sinon j’ai déjà joué en Afrique du sud et en Afrique de l’Est.

À quand remonte la sortie de votre premier album ?1997.

Et depuis 1997 vous n’avez fait aucun spectacle en Afrique ?
Si, au mali puisque la promo de mes albums commence toujours au Mali à travers un spectacle. Sauf qu’après, je n’y retourne plus pour en faire d’autres et après, c’est des tournées en Europe. J’ai eu plusieurs propositions venant du Burkina Faso que je n’ai pas pu honorer incompatibilité avec mon planning de travail. Tous mes musiciens ne sont pas en place et c’est difficile de les réunir en une ou deux semaines.

En 1997, il n’y a pas seulement eu la sortie de votre premier album, mais dans la même année, vous avez également été lauréate des « Découvertes RFI Afrique ». Comment cela s’est-il passé ?
Avant l’enregistrement de l’album, nous étions en répétition au Mali et à cette époque je n’avais pas de producteur. Il fallait donc préparer une maquette pour la faire écouter au producteur au cas où j’en trouvais un. Dès la finition de la maquette, un ami qui était directeur du CCF (Centre Culturel Français) m’a proposé de l’envoyer au concours RFI (Radio France Inter) plutôt qu’à un producteur. Et j’ai trouvé que cette proposition était bonne puisque après, j’ai remporté le prix avant même la production et la sortie de l’album.

Quels sentiments vous ont animés en ce temps ?Beaucoup de surprises et de joies. Pour moi, c’était le départ d’une chose très importante qu’il ne fallait pas rater et je ne voulais pas que cela soit une étoile filante qui disparaît dans les nuages et qu’on oublie par la suite. Ce qui, malheureusement, nous arrive parfois. Entre remporter un prix et mener une carrière, il y a une grande différence. C’est pourquoi je voulais que ce prix soit le début de ma carrière artistique.

Quel est votre regard sur les musiques africaines ?Certains artistes respectent les genres qu’ils font, d’autres malheureusement pas. Ce qui entraîne une confusion et marque une hésitation entre deux genres. Ils ne persévèrent pas dans le genre de départ cela est peut-être dû à un manque de confiance ou une envie de se faire connaître dans la précipitation. Par exemple : un artiste qui commence à se faire connaître dans son pays à travers la musique traditionnelle, va à un moment donné introduire dans l’orchestration une batterie, un clavier et une guitare électrique. Sur le coup, l’artiste sort du genre de départ qui n’était composé que d’instruments traditionnels. Pour changer aussi facilement de style, il faut à un moment donné ne plus savoir ce que l’on veut. Même si ce changement est parfois stimulé par l’envie de faire une musique commerciale, cela n’exclut pas l’échec des projets. Hormis ces erreurs, les musiques africaines se portent et s’exportent bien.

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