Concert de clôture des Zouglou Days : Pari réussi pour Angelo Kabila
Le public responsable et citoyen qui s’est déplacé samedi dans les jardins du palais pour vivre l’apothéose du concept annuel Zouglou Days de l’ingénieux Angelo Kabila, s’attendait à deux choses : Un, retrouver des « potes » du lycée ou du campus. Revivre les moments de joie de vivre d’il y a 20 ans déjà. Or, il y a 20 ans, les jeunes ivoiriens étaient mus par l’esprit Zouglou. Dire haut ce qu’ils pensaient et faire comprendre que gbè est mieux que drap (dire ce qu’on pense).
Samedi dernier alors était ce moment propice pour « siffler » le breuvage qu’il faut, la bière. Et l’un des partenaires de l’événement (Brassivoire avec la bière Ivoire) était le bienvenu. Et une fois encore, l’ombre de Gbagbo a plané sur ces moments de retrouvailles.
En levée de rideau, l’on a eu droit à la prestation du sympathique groupe d’ambiance facile « les pros du zouglou ». Il a entamé réellement les débats zougloutiques peu après, en enchaînant plusieurs chansons de faits anecdotiques, et des imitations de certaines gloires, comme Poignon, qui ont marqué toute une génération d’étudiants devenus cadres supérieurs de ce pays, baignée par ce genre musical révélé dans les années 80.
22h, ce fut au tour de Valé et Pat Sako, le duo du groupe populaire « Espoir 2000 » de monter sur scène sous les acclamations et les cris de joie des zouglouphiles, dans la cour du palais. Au cours d’une heure aussi, le duo enchaine ses succès truffés de tubes incontournables comme « série c », « sorcières », « ivoirien », « au temps de Boigny » repris avec fougue par le public. Et en y glissant le nom du célèbre prisonnier de Scheveningen, la foule soulevait des cris hystériques. Ici encore son nom fait effet. Car ces jeunes cadres par des messages codifiés se reconnaissent et ont soif de liberté d’expression. Et c’est à juste titre que l’artiste le Molare monté sur scène pour encourager ses amis en travaillant sur eux, n’a pas hésité de dire « pour la paix dans ce pays, il faut libérer Blé Goudé et Gbagbo Laurent » fin de citation.
Malgré la sono défaillante, confession d’Angelo Kabila, à 22h 50 alors que les spectateurs sont désormais plongés dans une animation frénétique, une petite transition suffit pour annoncer Yodé et Siro sur le podium inondé par des jeux de lumières, gérés par une régie à l’ouvrage. Les deux hommes alors interprètent des chansons plus connues des fans purs et durs. La voix suave et limpide de Yodé aguerrie depuis « Les Poussins Chocs » et l’appui des histoires drôles de Siro font passer de bons moments. Des titres connus comme « la vie », « le bossu », » l’enfer sur terre », « Mr le président » et un mélange de plusieurs tubes qui restent gravés dans l’esprit des mélomanes. Dans un dialogue musical dont eux seuls ont la maitrise, chacun scande le nom du président Alassane et Gbagbo. A l’applaudimètre, l’ex président est en tête dans le public. C’est sur ces notes qu’ils quittent le podium à la grande satisfaction des inconditionnels qui n’entendent pas quitter de sitôt le show.
Ils n’ont pas eu tort puisque, vers minuit, le tant attendu « enfant de gbatanikro » Petit Denis, qui n’était pas prévu sur le conducteur du spectacle, selon Angelo Kabila, entre enfin en scène. On l’attendait tous. Depuis son entrée dans un centre de désintoxication il n’avait pas produit de spectacle. Et il lui fallait reprendre le micro pour regagner confiance en lui et ainsi jauger sa cote de popularité au sein de la jeunesse consciente ivoirienne. La perche que lui a tendue alors les Zouglou Days était une superbe occasion pour prouver qu’il est une identité remarquable du Zouglou en Côte d’Ivoire. C’était donc l’une des grandes satisfactions de cette grande messe du zouglou dont l’apothéose ne pouvait s’achever sans la participation du Petit Denis, désormais Denco. Après 4 villes à l’intérieur du pays la caravane Zouglou Days connait ainsi son apothéose avec panache. Il ouvre son micro avec un titre inédit qui n’emballe pas vraiment. Mais lorsqu’il entonne avec ses fans son dernier single « Mon lieutenant », c’est le chorus. Puis il enchaîne coup sur coup une demi-douzaine des tubes qui ont fait sensation dans les années 90 dont « Gnanhi », « Zipo Gbolo », « papa polo », « tournoi ». Pour en rajouter et faire prendre la sauce et comme il en est le maître, nul doute, il en garde jalousement son secret, Denco entre dans les improvisations de type « waé waé » (de toute sorte) pour faire libérer (danser) tous les parents (inconditionnels) du zouglou, on ne le dira jamais assez, le zouglou reste la marque déposée de la musique ivoirienne. Sa jeunesse consciente et intellectuelle était discrète mais présente. On a pu voir les initiateurs aujourd’hui, officiers supérieurs de police, cadres supérieurs et responsables de multiples structures esquisser quelques pas à leur place. Elle le la revendique et ne rate pas d’occasion pour se retrouver. Jusqu’autour de 02h du matin où l’événement prenait fin la ferveur n’a pas du tout manqué dans l’esprit des spectateurs. Ce fut de bons moments qu’on n’oubliera pas.
Olivier Yro