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Serges Bilé « Le seul passager noir du Titanic »

Sephora Damack | | Litterature

Serge-Bile

Serge Bilé rétablit une vérité historique « Contribuer par des actions d’envergures à la restauration de la dignité des peuples noires », c’est dans ce canevas que s’inscrit le combat que mène le journaliste écrivain ivoirien Serge Bilé en suivant bien entendu les pas de prédécesseurs tel que Bernard Dadié, Mongo Béty ou encore Frantz Fanon.

L’intention du journaliste à travers son ouvrage baptisé « Le seul passager noir du Titanic » est de réparer un tord ou du moins apporter une réplique cinglante à l’histoire qui omet de signifier qu’à bord du Titanic se trouvait un homme noir. « Le naufrage du Titanic a donné lieu depuis un siècle à une multitude de livres, de films, et de jeux vidéo. Mais pas un de ces supports ne s’est intéressé jusqu’ici au seul passager noir qui se trouvait à bord. C’est cette lacune que j’ai voulu combler. Il ne s’agit pas d’un livre de plus sur le Titanic. J’ai voulu en fait profiter de la vie de cet homme pour revisiter l’époque et offrir aux passionnés de ce géant des mers une nouvelle approche de la tragédie » souligne l’écrivain.

« Le Seul Passager noir du Titanic » est un ouvrage qui balade dans les compartiments de la vie d’un Hatien nommé Joseph Laroche. Il se trouvait être le seul noir à bord du Titanic lors du naufrage du paquebot en avril 1912. Alors qu’il voyageait avec sa famille. Quand soudainement le bateau a percuté un iceberg et sombré au large de terre. Joseph Laroche est né en 1866 et a grandit dans une ville historique située dans l’extrême nord de l’Haïti. Là où régnait le roi Christophe, un ancien esclave devenu monarque puis despote.

Le père du héros de l’ouvrage appartenait à la haute bourgeoisie du Cap haïtien. Et faisait des affaires dans l’import export. A 15 ans, Joseph Laroche est envoyé en France dans une école religieuse à Beauvais, l’Institution du Saint-Esprit. A la demande de Sa mère qui veut qu’il fasse de grandes études dans les meilleurs établissements, quoi qu’il en coûte. C’est la première fois que le jeune garçon quitte son pays, la première fois aussi qu’il prend la mer et le bateau. Une fois en Europe le jeune Joseph n’a d’autres choix que de s’accrocher à ses études afin de mériter la confiance en lui placer par ses géniteurs.

Joseph Laroche est un bon élève. Après son bac, il fait des études d’ingénieur, obtient son diplôme, se marie, s’installe à Villejuif avec son épouse, et se met à chercher du travail. Il décroche son premier emploi chez Nord-Sud, une société privée qui construit et exploite le métro parisien. Il sera chargé de réaliser le tracé de la ligne qui relie la Porte de la Chapelle à la Porte de Versailles, l’actuelle ligne 12. Très vite, Joseph Laroche déchante. Après ce premier contrat, il collectionne les petits boulots mal payés.

Il est en outre confronté à des préjugés raciaux. C’est l’époque des zoos humains, où les Noirs sont exposés comme des animaux dans des cages en public. Excédé, l’ingénieur convainc sa femme d’aller vivre avec leurs deux filles dans son pays. Ils doivent pour cela gagner les Etats-Unis, d’où ils prendront un second bateau pour Haïti. Et c’est à raison qu’il prend cette décision car, son oncle Cincinnatus Leconte vient d’accéder à la présidence, après avoir pris le pouvoir par les armes. Il propose à son neveu deux postes d’enseignant au Cap Haïtien.

Le 10 avril 1912, le jeune homme s’embarque avec femme et enfants sur le Titanic à Cherbourg. Sur le Titanic, c’est le grand luxe. Les salons, les bains turcs, les ascenseurs, les restaurants, Joseph Laroche est ébloui. Il installe sa famille dans une magnifique cabine de deuxième classe. Ses filles sont heureuses. D’ailleurs la plus grande n’arrête pas de courir partout sur le bateau. Sa femme aussi est aux anges. Elle apprécie particulièrement l’orchestre et ses grands musiciens, comme le violoncelliste Roger Bricoux. Mais leur joie, comme on le sait, sera, hélas, de courte durée. Car dans la nuit du 14 au 15 avril 1912, le Titanic heurte un iceberg et coule au large de Terre Neuve.

La femme et les deux filles de l’ingénieur haïtien sont sauvées. Joseph Laroche, lui, n’aura pas cette chance. Il fait partie des 1496 victimes de la catastrophe. Loin de faire revivre un drame, le journaliste écrivain expose ici la vie fascinante d’un jeune noir dont l’objectif était de se réaliser surtout de faire comprendre aux uns et aux autre qu’être noir à cette époque ne devait en aucun cas constituer un handicap pour une ascension au sein de la société.

 

Sephora Damack