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Maryse Condé dépose ses valises à Göteborg

Firmin Koto | | Litterature

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De la Guadeloupe á l’Afrique, en passant par New York… La romancière Maryse Condé a toujours de quoi entretenir les consciences. Sur son chemin, dépuis la semaine derniere, elle á déposée ses valises á Göteborg en Suède á l’occasion de la Conference des livres et des bibliothèques pour présenter son livre « la traversée de la mangrove » qui vient d’être traduit en suédois et édité en français dépuis 1992. Morceaux choisies d’une écrivain reconnue á l’echelle mondiale pour son talent.

Maryse Condé est née le 11 février 1937 à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) où sa scolarité secondaire s’est déroulée avant qu’elle ne vienne à Paris étudier les Lettres Classiques à la Sorbonne.  En 1960, elle se marie au comédien Mamadou Condé et part pour la Guinée où elle affronte les problèmes inhérents aux États nouvellement indépendants.  Après son divorce, elle continue de séjourner en Afrique (au Ghana et au Sénégal notamment) avec ses quatre enfants.  De retour en France en 1973, elle se remarie à Richard Philcox, enseigne dans diverses universités et entame sa carrière de romancière.  Après la publication de Ségou, son quatrième roman, elle rentre en Guadeloupe.  Cependant, elle quitte bientôt son île natale pour s’établir aux USA où elle enseigne aujourd’hui à Columbia University.  Ses oeuvres principales sont Heremakhonon (1976), Ségou (2 volumes, 1984-85), Desirada (1997), Célanire cou-coupé (2000)

Romancière, militante, enseignante et critique… Maryse Condé est tout cela mais peut-être aussi et surtout navigatrice. Car la grande dame de la littérature antillaise nous invite à explorer des univers très divers, depuis le monde cruel de la traite des Noirs à la spirale de la passion amoureuse. Parcourant l’entrelacs des relations entre l’Afrique, les Antilles et l’Europe, la littérature à succès de Maryse Condé se nourrit de son expérience personnelle.
Après avoir quitté le confort familial à l’âge de 16 ans pour poursuivre ses études à Paris. L’effervescence de la décolonisation et du mouvement de la négritude l’amène à sillonner l’Afrique occidentale, d’abord avec son mari guinéen puis seule, avec ses quatre enfants. A son retour à Paris en 1973, elle achève son doctorat sur la littérature antillaise à la Sorbonne tout en se lançant dans une carrière littéraire. Elle connaît le succès avec Ségou, les murailles de terre (Robert Laffont,1984), description captivante de l’impact de l’islam sur l’Afrique de l’Ouest animiste et de la brutalité de la traite négrière.

En 1985, Maryse Condé est invitée à enseigner aux Etats-Unis. Elle y fonde le Centre des études françaises et francophones de l’Université de Columbia, où elle enseigne encore aujourd’hui. Ses 11 œuvres de fiction (traduites en de multiples langues) lui ont valu de nombreuses récompenses, dont le Grand Prix littéraire de la femme (1986) et le prix Yourcenar (1999). Plus important encore, Maryse Condé est l’un des rares auteurs «étrangers» à être reconnu comme l’un des leurs par les Africains. Son mari Richard Philcox et elle partagent leur temps entre New York et la Guadeloupe. Dans notre 7e editon de 100% culture nous avons á la suite de cet article l’ heureux plaisir de vous provoser une de ses conversation avec sa consœur de Trinidad, Elizabeth Nunez. La romancière raconte son parcours de femme noire et sans complexe, d’écrivaine entre trois continents.

Interview réalisé par Elizabeth Nunez
http://www.unesco.org/courier/2000_11/fr/dires.htm

«La race n’est pas primordiale»
J’ai été très touchée par une conférence que vous avez donnée, il y a deux ans. Vous expliquiez comment, pendant votre enfance à la Guadeloupe, vous ne vous sentiez pas différente d’une Française. Alors pourquoi avez-vous tenu à aller en Afrique?

Souvenez-vous, Elizabeth, lorsque nous sommes allées ensemble au restaurant à la Guadeloupe. Vous avez été choquée de constater que tout le personnel était français et blanc. Cela vous donne une idée du contexte où j’ai grandi. Les enseignants étaient français. Les prêtres, lorsque nous allions à la messe en famille, étaient blancs. Nous vivions dans cet environnement et cela me semblait normal. Je ne me posais pas de questions. Bien sûr, je voyais bien que j’étais noire, mais je n’accordais aucune importance à la couleur de ma peau. Puis je suis allée en France et j’ai découvert que je n’étais pas noire par hasard. Une différence profonde existait entre moi et les gens dont la peau était blanche. Il fallait que j’aille en Afrique pour découvrir la signification et l’importance de cette différence.

Qu’avez-vous découvert?
Au début, j’ai cru qu’une origine et une histoire communes unissaient tous les Noirs, que nous formions un seul peuple, divisé par le fléau de l’esclavage. Entre les Guinéens – parmi lesquels je vivais – et moi, née en Guadeloupe, seule la traite négrière avait créé une séparation.

Et vous ne le pensez plus?
Ma première découverte importante en Afrique, c’est que je ne parlais pas la même langue que les Guinéens. Nous ne mangions pas les mêmes plats – cela peut vous paraître dérisoire, mais c’est important. Nous ne nous habillions pas de la même façon, nous n’aimions pas la même musique, nous ne partagions pas la même religion. Au bout de quelques mois, je me suis sentie terriblement isolée. Je ne pouvais même plus communiquer avec mon mari guinéen. De là est née ma deuxième découverte: la race n’est pas le facteur essentiel. La culture est primordiale. Comme je ne partageais pas la culture des Guinéens, des Africains, j’ai quitté l’Afrique. Cette décision a mis fin à mon mariage.

La proximité culturelle avec votre mari, Richard Philcox, blanc et britannique, est donc plus importante que celle qui existait avec votre premier mari, bien qu’il fût noir et africain.
Lorsque j’ai rencontré Richard, il y a 20 ans, j’étais dans ma période militante et je ne concevais pas de vivre avec un Blanc. Ma relation avec lui a beaucoup troublé mes enfants, qui étaient eux aussi très nationalistes. Mais j’ai fini par comprendre que la couleur de la peau n’avait pas d’importance. Ce Blanc m’était plus proche que mon premier mari, plus proche que la plupart des gens que je connaissais. C’est une question de compréhension mutuelle, en un mot, d’amour. Le mariage n’est pas un engagement politique. Il concerne les sentiments et les choix personnels de deux individus.

Revenons-en au moment où vous quittez l’Afrique. Où vous installez-vous alors?
Je devais gagner ma vie. Je suis allée en France, malgré les difficultés pour y trouver du travail. Je me suis immergée dans la communauté antillaise, j’ai vécu comme une exilée. Cinq ans plus tard, je retournais à la Guadeloupe.

Et aujourd’hui, que pensez-vous de l’Afrique?
J’ai parfois l’impression d’être victime d’un cruel coup du sort: à peine sommes-nous parvenus à nous sentir fiers de notre riche héritage africain que nous nous voyons bombardés d’informations sur la corruption généralisée, semble-t-il, sur le continent.

N’en avez-vous pas honte, parfois?
J’ai vécu pendant 12 ans en Guinée et au Ghana. Ces années ont été les plus difficiles de mon existence. Les régimes y sont corrompus, c’est indiscutable. Les gens pâtissent de l’incurie de leurs dirigeants. Ils meurent de faim ou de maladie. Le continent souffre de mille maux, à quoi bon le nier? Mais on ne doit pas en conclure que l’Afrique est inférieure. Il a fallu des années aux pays européens pour parvenir à la démocratie. Nombre d’entre eux ne sont pas au bout de leurs peines. La France, par exemple, est constamment déchirée par des grèves et des affrontements. Pourquoi aurions-nous honte des problèmes de l’Afrique, que le néocolonialisme et le manque d’éducation contribuent à aggraver? Cette situation résulte d’un long passé colonial, des conditions très défavorables dans lesquelles les indépendances sont survenues. L’Afrique s’efforce de surmonter ses problèmes. Je suis sûre qu’elle y parviendra un jour.

Dans votre roman Les Derniers Rois mages [Gallimard, 1995], je vois une satire de ces Africains-Américains des classes moyennes qui n’évoquent les Africains qu’avec révérence et critiquent ceux qui osent dénoncer la corruption régnant sur le continent. Vous situez cette histoire dans «une prestigieuse université noire d’Atlanta, où les dévoués professeurs parlaient autant du devoir envers la race que de sciences ou de littérature».
Ce comportement, chez certains Africains-Américains, masque un profond complexe d’infériorité. Ils ont honte de l’Afrique telle qu’elle est aujourd’hui et préfèrent mentir à propos des fléaux dont elle souffre. Regardons les choses en face: l’Afrique a été privée de sa grandeur, de son pouvoir, de sa magnificence. Si nous continuons à occulter cette réalité douloureuse, notre perception du continent restera incomplète. Nous avons un devoir envers notre peuple qui souffre, il est temps d’en prendre conscience. Obtenir réparation pour l’esclavage, arracher des aides financières? Ces combats ne m’intéressent pas. Je lutte pour élaborer une solution que je puisse offrir aux populations africaines désespérées qui ont besoin de reprendre confiance en elles. Pour citer Marcus Garvey1: «J’aimerais apprendre à l’homme noir comment trouver la beauté en lui-même». Le problème pour moi n’est pas de combattre les Blancs qui sont mauvais et néfastes, mais de combattre ceux d’entre nous qui sont mauvais et néfastes.

Et pourtant vous parlez beaucoup de l’esclavage dans vos livres, ce qui me paraît inhabituel pour un écrivain de la Caraïbe. Les Antillais semblent vouloir sauvegarder leur bonne opinion de la «mère-patrie» et des Européens. Récemment, une journaliste britannique, expatriée à la Trinité, rendait compte de mon dernier roman, Bruised Hibiscus. Piquée au vif par ma critique du colonialisme, elle insinuait que je mordais la main qui m’avait nourrie. J’ai été choquée par l’absence de réactions, même au sein de ma famille. Personne n’a fait l’effort de rappeler l’évidence: l’esclavage et le colonialisme ont nourri les Britanniques, pas le contraire. Et vous-même, que cherchez-vous à montrer, à travers vos récits sur l’esclavage?
On me demande souvent pour qui j’écris. J’écris pour moi-même. J’écris à propos de l’esclavage, de l’Afrique, de la condition des Noirs dans le monde parce que je veux ordonner mes pensées, comprendre le monde, être en paix avec moi-même. J’écris pour trouver des réponses aux questions que je me pose. L’écriture est pour moi une sorte de thérapie.

Vous ne cherchez pas à instruire?
Non, pas vraiment. Les premières générations d’écrivains, comme Aimé Césaire, avaient cet objectif: instruire leur peuple, écrire pour lui. J’appartiens à une génération plus modeste. Nous écrivons d’abord pour nous rendre le monde compréhensible et si nous y parvenons, peut-être aidons-nous aussi nos lecteurs.

Est-ce pour cette raison que vous n’écrivez pas en créole?
Selon certains intellectuels, je pense au Martiniquais Patrick Chamoiseau, les écrivains de la Caraïbe devraient écrire dans la langue de la plupart des Antillais.

Je refuse ce genre d’opposition entre français et créole. Comme je le dis souvent, Maryse Condé n’écrit ni en français, ni en créole, elle écrit en Maryse Condé. Chacun d’entre nous doit trouver sa voix, sa manière d’exprimer des émotions, des impressions intimes, ce qui exige d’utiliser tous les langages possibles. A la fin de mon dernier roman, Célanire cou-coupé [Robert Laffont, 2000], vous trouverez un glossaire contenant du vocabulaire issu de langues africaines, de langues créoles ou de l’espagnol. Pour raconter, sans la trahir, l’histoire que j’avais en tête, j’avais besoin de toutes ces sources. Restreindre l’alternative au français ou au créole est un choix politique. En politique, il est nécessaire de parler la langue la plus compréhensible par les gens, mais un écrivain devrait avoir toute liberté pour choisir le mode d’expression le mieux adapté à ses désirs.

Et pour vous, ce mode d’expression est le français?
Mon français, ma propre version du français qui n’est pas la langue qu’on entend en France. C’est un mélange entre la langue d’une personne née en Guadeloupe, à l’écoute des nombreuses sonorités différentes du langage, et mon langage personnel.

Dans ce cas, qu’est-ce qu’un authentique écrivain antillais?
J’ai horreur du mot «authentique». Me voici, moi, Maryse Condé, née en Guadeloupe, ayant vécu en Afrique et à Paris, vivant et travaillant à New York. Vous voilà, vous, Elizabeth Nunez, née à la Trinité, ayant passé la plus grande partie de votre vie à New York. Nous sommes toutes deux d’authentiques écrivains antillais. Cela tient à des choix personnels, aux relations avec son pays d’origine, à une manière de concevoir sa place dans le monde et de se percevoir soi-même.

C’est vrai. Mais parce je vis ailleurs, il me semble parfois que les Antillais estiment que je n’ai plus le droit d’écrire sur les Antilles, que je ne peux pas en parler de manière authentique.

Que veut dire «en parler de manière authentique»?
Ecrire, c’est donner sa propre version de la réalité. Je n’ai pas besoin de me justifier. Libre aux lecteurs de penser que je ne suis pas un véritable auteur antillais; je crois, moi, avoir toute légitimité pour écrire sur la Guadeloupe et pour affirmer que je suis une véritable écrivaine guadeloupéenne.

Mais pensez-vous qu’il existe une littérature antillaise?
Oui, mais elle est difficile à définir. L’écriture d’Edwige Danticat [une jeune Haïtienne vivant à New York] représente un aspect de la littérature antillaise. Vous, Elizabeth Nunez, un autre aspect. Moi, encore un autre, et les gens qui écrivent depuis leur île – Patrick Chamoiseau, par exemple – représentent un aspect encore différent. Toutes ces voix composent une symphonie qui est la littérature antillaise. Je ne vais pas la définir, parce qu’elle est trop complexe, trop plurielle, trop changeante pour s’épuiser dans une étroite définition.

On me range parfois parmi les écrivaines féministes parce que les personnages féminins, dans mes romans, ont souvent de fortes personnalités. Pourtant, ce n’est pas un parti-pris. Je m’inspire des femmes qui ont exercé une influence sur moi, qui prennent leur vie en charge. Vos personnages féminins, eux aussi, sont remarquables. Vous définiriez-vous comme une écrivaine féministe?
Je ferai la même réponse que vous. J’ai été élevée par ma mère et ma grand-mère, deux caractères forts. Tout comme mes sœurs. Et comme les autres femmes que j’ai connues en Guadeloupe. Elles n’abdiquaient pas face à l’adversité. Je ne me considère pas comme une féministe. J’écris sur ce que je connais.

J’aime beaucoup La Migration des cœurs [Robert Laffont, 1995]. Quelle libération de voir le grand classique d’Emily Brontë, Les Hauts de Hurlevent, au travers de personnages noirs! Vous réduisez à néant les théories racistes qui cherchent à nier notre humanité commune. Etait-ce là votre intention, ou aviez-vous des raisons plus personnelles d’écrire ce roman?

J’étais une enfant très sombre, très solitaire. J’étais toute petite lorsque ma mère est morte, et pendant des années, j’ai essayé de rétablir le contact avec elle. Je la cherchais partout, dans la nature, partout. J’avais peut-être 15 ans et je vivais à la Guadeloupe quand on m’a offert Les Hauts de Hurlevent. J’ai eu le sentiment que ce livre avait été écrit pour moi. Je me suis identifiée à Heathcliff, à sa rage de retrouver Cathy après sa mort. J’ai écrit ce roman pour montrer qu’en dépit des différences d’époque, de situation ou d’idéologie, les femmes peuvent communiquer entre elles parce qu’elles partagent des expériences et des désirs communs. A un siècle de distance, Emily Brontë peut s’adresser à Maryse Condé. Il fallait que je réécrive le récit d’Emily Brontë, non pour mettre en évidence les différences entre les Antillaises et les Anglaises, mais plutôt pour montrer nos points communs.

Vous commencez votre livre en espérant qu’Emily Brontë approuvera votre interprétation de son chef-d’œuvre. Ce souhait vous a-t-il limitée d’une manière ou d’une autre?

En écrivant mon roman, je dois avouer que j’ai totalement oublié Emily Brontë. Je me suis attachée à la relation entre Cathy et Heathcliff, à l’amour fusionnel des deux personnages. Mais je relisais souvent le roman d’Emily Brontë, et je le gardais sur mon bureau, ouvert à la page où Cathy dit: «Je suis Heathcliff». C’est une phrase magnifique. Elle dit l’intensité de la passion possible entre deux êtres. En achevant mon roman, je me suis demandé ce qu’Emily Brontë en aurait pensé, mais sans m’attarder sur cette question.

Pouvez-vous nous parler de votre travail à l’Université de Columbia? Vous y avez créé un département d’études francophones. En fait, vous le présidez.
Les Antillais anglophones ou hispanophones sont reconnus à New York, mais on ignore largement les francophones. C’est comme si nous n’existions pas. Quand je dis que je viens de la
Guadeloupe, mes interlocuteurs sont perplexes. Ils n’en ont jamais entendu parler. Lorsque j’ai été invitée à enseigner la littérature antillaise à l’Université de Columbia, j’ai considéré comme un devoir de créer ce département,
pour attirer les Antillais francophones, pour qu’ils disposent d’un espace où parler d’eux-mêmes, de leur travail et qu’ils puissent se faire connaître. A Columbia, au moins, on sait désormais qu’Aimé Césaire n’est pas le seul écrivain antillais francophone.

Vous êtes beaucoup trop modeste, Maryse. Je sais quels efforts vous déployez pour promouvoir la littérature antillaise. Vous avez organisé des colloques remarquables sur le sujet et, récemment, vous avez créé le prix des Amériques insulaires et de la Guyane, qui récompense le meilleur ouvrage littéraire antillais, quelle qu’en soit la langue.
On m’a parfois reproché d’avoir accepté l’argent d’un béké [Créole blanc issu de la «plantocratie»] pour financer ce prix. Mais Amédée Huyghues Despointes aime la Guadeloupe autant que je l’aime. Il se préoccupe de l’avenir de ce pays. Il serait temps d’en finir avec ces divisions entre Noirs et Blancs.

Votre nouveau livre s’intitule Célanire cou-coupé…Avez ce roman, je m’éloigne des précédents. Mes filles se plaignaient que tous mes romans soient tristes et douloureux; j’ai donc écrit un roman comique et fantastique. Il s’inspire d’un fait divers, publié par un journal guadeloupéen en 1995, à propos d’un bébé de sexe féminin trouvé mort, la gorge tranchée, sur un tas d’ordures.

Cela ne m’a pas l’air très gai, Maryse.
Ecoutez, vous me direz ce que vous en pensez. Tout le monde veut savoir pourquoi la petite fille a été tuée ainsi. En général, une femme qui veut se débarrasser de son bébé ne lui tranche pas la gorge. C’est trop cruel. Du coup, les Guadeloupéens s’imaginent qu’elle a été sacrifiée. Dans l’histoire, la fillette est ramenée à la vie par un médecin qui lui rafistole le cou. Elle part ensuite à la recherche de ceux qui l’ont assassinée.

C’est une histoire très triste.
Attendez. La jeune fille s’attaque alors à tout ce que nous considérons comme sacré. Par exemple, elle part pour l’Afrique au début de la colonisation. Lorsqu’elle se rend compte que la colonisation est un échec à cause de l’absence totale de communication entre Africains et Européens, elle décide de remédier à la situation en créant un bordel où des Africaines font l’amour à des Blancs.

Tiens, vous riez.
Ça, c’est drôle.

Vous voyez que c’est un roman comique.

Une farce.

Oui, c’est le mot.
Vous êtes un magnifique écrivain, vous menez une brillante carrière d’enseignante, de chercheuse, d’administratrice, de militante littéraire, de mentor pour écrivains débutants, tout en ayant une vie de famille très active.

Comment arrivez-vous à tout concilier?
Honnêtement, je n’ai pas de réponse. Je ne fais pas l’effort d’être ceci ou cela. Je suis tout à la fois.

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