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Livre témoignage de Mme Simone Ehivet Gbagbo,

Dramane Kone | | Litterature

Après le père, le fils et enfin la mère
Voilà une Trinité locale qui ne manque pas de féminin. Contrairement à la Sainte Trinité où l’on a le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Du masculin, rien que de masculin. Curieux, non ? Mais ne blasphémons pas en ce début de jeûne chrétien ou carême.


Que Dieu, le Très Miséricordieux, bénisse et salue toute la communauté chrétienne Amina. Comme dans toute Trinité, tout commence par le père, Laurent Gbagbo, universitaire-historien, écrivain politique longtemps confirmé, aujourd’hui Président de la République. L’écrivain politique, disait George Orwell, ne doit pas être confondu ni avec l’écrivain qui fait de la politique (par exaltation, vanité ou opportunisme), ni, à plus forte raison, avec l’homme politique qui veut se faire passer pour un écrivain (cf. le cas de Henri Konan Bédié avec son premier livre « Les chemins de ma vie », qui a encombré un temps de saison les vitrines de nos librairies et qui n’a jamais été suivi de second). L’écrivain politique est, de fait, un écrivain qui a le plus grand souci du mot juste (cf. Conficius qui nous rappelle que : « Qui parle mal gouverne mal » et Bédié parle mal). L’écrivain politique se méfie aussi des grands effets (médiatiques) et ne se prend ni pour un héros, ni pour un prophète. Il s’assigne d’ailleurs des buts modestes et accessibles tels que montrer le monde tel qu’il est (cf. l’article de Philippe Dagen intitulé « Orwell, au coeur de
l’inhumanité « , in Le Monde des livres du 04/07/2003)

Le même donnant toujours le même, autant dans le champ politique que dans le champ familial, l’envie d’écrire prit le fils patriote, Michel Gbagbo, universitaire-psychologue, chez qui l’on observe aussi le même désir de rigueur, d’indépendance et de liberté (« Voler écessairement mais sans les ailes du père »).. Qui dit mieux ? Pour constituer la Trinité locale, il ne restait plus que la mère, l’honorable député Simone Ehivet épouse Gbagbo Laurent. C’est fait depuis le 9 février 2007, jour de la sortie en France de son premier livre intitulé « Paroles d’honneur »,
éditions Ramsay. Avec ce titre, cette universitaire-linguiste
donne la preuve que l’on se défait difficilement de sa passion : la linguistique, science qui a pour objets la langue, le langage et la parole. J’y reviendrai très prochainement, mais, pour l’heure, sachons gré au philosophe Voho Sahi Alphonse (in Frat-Mat du 17/02/07) et au journaliste Théophile Kouamouo (cf. les numéros 941, 942, 943 du Courrier d’Abidjan) d’avoir analysé à
fond quelques aspects de ce puissant ouvrage qui est à la fois « témoignage d’une vie de combat dévoué à la liberté politique et sociale » et « devoir d’indignation » vis-à-vis des blessures reçues. Affaire à suivre Voilà présentée, non pas le couple présidentiel, mais la famille présidentielle (père-fils-mère). Elle est là, désormais tout près. Elle nous réveille en veillant aussi bien dans le champ politique que dans celui de l’écriture.

1 – La Côte d’Ivoire, un air de changement

Tel est le titre du dernier livre de Michel Gbagbo (cf. éditions NEI-CEDA, Abidjan, 2006). Et si c’était cela aussi. Cette grande première dans l’histoire de notre pays : voir, au sommet de l’Etat, un président écrivain, son épouse écrivain, leur fils écrivain. Une révolution mais, aussi et surtout, une vraie richesse qui fortifie et oxygène la République. Une grande République, et c’est le cas de la Côte d’Ivoire, est avant tout une République des esprits ou de ceux qui savent et qui ont pour maître Aristote et plus près de nous Harris Memel Fotê. C’est aussi cela la « Refondation » ou faire de la politique autrement.
En effet, un vrai air de changement souffle sur notre pays mais à bas bruit. Les signes de cet air nouveau sont, entre autres, les publications juteuses de Mamadou Koulibaly, Séry Bailly, Genéviève Bro Grébé, Blé Goudé, Gomé Gnohité Hilaire, Théophile Kouamouo, des monuments inoxydables de la résistance que sont Bernard Dadié, Cheick Ahmadou Sylla et j’en passe. A bas bruit, une extraordinaire métamorphose politico-culturelle est en train de se produire sous nos yeux. De quoi mettre mal à l’aise, voire inquiéter tous ces acteurs politiques pour qui la politique n’est ni le verbe ni les réflexions philosophiques, mais le sûr moyen de faire des « affaires « . L’argent en vitesse et par tous les moyens avant les mots et la théorie, disent ces impatients cauteleux qui souffrent tous d’une forme de complexe à l’égard des livres. La médiocrité de l’opposition politique ivoirienne vient de là. Des gens qui ne lisent point Ce n’est donc pas un hasard quand ces affairistes qualifient leur « retour au pouvoir » de « Retour aux affaires « . Quelle histoire ? Et dire que ces gens-là se prennent au sérieux et veulent façonner notre destin, alors qu’ils n’ont pas plus de conscience politique qu’un moineau. Il y a de quoi rire.

2 – Peut-on aller en politique sans écrire ?

Voilà la question (du reste plus large) que soulève la singulière Trinité locale. « Ou », avait répondu notre premier Président, Félix Houphouet-Boigny. Il n’a donc écrit aucun livre et prétextait que l’on n’avait pas besoin d’écrire pour être célèbre. Il citait les cas de Jésus et de Mahomet. Que Dieu les bénisse et les salue. Houphouet avait confondu (à dessein) héros ou père de l’indépendance et prophètes ou Envoyés de Dieu. Une vraie fuite en avant qui cachait, en réalité, un complexe intellectuel, que dis-je, un complexe devant les livres et les écrivains En fait, n’est pas écrivain qui veut Dans ces colonnes miennes, j’ai souvent rappelé que « parler est un peu le métier des hommes politiques ». Si l’on sait que l’écriture est, par essence, une tentative de fixation de l’oral, écrire devient pour l’homme politique non pas un second métier, mais un aspect de son métier où l’on apprend fort justement que les paroles s’envolent et que seuls restent les écrits. Champ des passions et des ambitions (comme dans le champ de l’amour où l’on dit que : « êcrire, c’est aimer ; aimer c’est écrire »), la politique ouvre toujours le chemin de l’écriture, l’écriture par l’observation (le champ politique n’est-il pas lui-même observation et décryptage de signes) et par l’expérience de la profession et surtout par l’expérience de la lecture.
L’ex-Première Dame du Mali, Mme Adame Ba Konaré, universitaire-historienne ne dit pas autre chose dans ses rapports à l’écriture. Ensemble lisons : « Malgré mes connaissances cumulatives sur la nature du pouvoir, je réalise qu’il n’y a pas de texte de référence abstrait ; que tous les référentiels, même « Le Prince » de Machiavel, partent d’une expérience propre, d’un vécu personnel, souvent aux antipodes de toutes les constructions qui se font autour ; mais que toutes ces références peuvent guider des générations d’acteurs politiques. La pratique du pouvoir est, en soi, une source d’inspiration profonde  » (in « L’os de la parole, cosmologie du pouvoir », Ed. Présence africaine, Paris, 2000, p. 21). Si donc la pratique du pouvoir est, en soi, une source d’inspiration profonde, pourquoi, par exemple, nos deux ex- (Président de la République et Premier ministre) ne publient pas, mais n’arrêtent pas de parler, de tchatcher ? Comment ces leaders ou dirigeants poussiéreux et revanchards dont le vide conceptuel tient lieu de politique, comptent-ils gouverner notre pays, désormais engagé dans une métamorphose politico-culturelle au-dessus de leurs forces rétrogrades et anachroniques ? Il est permis de se poser ces questions
Que fleurissent dans le champ politique plusieurs écrivains politiques pour la consolidation des fondations de la République et la démocratie ! Que Dieu, le Miséricordieux veille et bénisse tous les chrétiens y compris la famille présidentielle. Bon carême à tous et à toutes!