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Gaston Kelman : Ce Noir qui n’aime pas le manioc récidive avec Parlons enfants de la patrie.

Atse Ncho De Brignan | | Litterature

Gaston Kelman, ce Franco-camerounais, a été révélé au grand public pour avoir écrit le best-seller politiquement incorrect qui a fait florès en 2004 « je suis Noir et je n’aime pas le manioc ».

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Ce manioc qu’il n’aime pas en fait, c’est l’image des préjugés comme le Noir danseur, rigolard et bouffeur de manioc. Alors, pour lui, on peut être Noir et ne pas aimer le manioc ou le djembé. C’est pour quoi dans son premier livre, il y a certaines blagues sur les Noirs qui sont en tête de chapitre qu’il trouve bonnes et d’autres du florilège qu’il qualifie d’archi nulles même « si elles peuvent être thérapeutiques ». En un mot, sur ce point, Kelman n’est pas fier d’être noir pour le simple fait que selon ses termes : « il ne tient qu’au Noir d’être envié pour autre chose que son sexe, son rire et son coup de rein de bambouleur. Moi, je n’ai pas le rythme dans le sang, j’ai des globules. Et quand il s’agit de comprendre pourquoi les Noirs sont déclassés socialement, je ne vois pas la nécessité de refaire l’histoire d’un peuple qui a beaucoup souffert ».
Aussi, pour avoir affirmé un jour lors d’un échange avec des internautes qu’ au Cameroun, tout ce qui est beau est blanc et tout ce qui est nul est indigène, on [la communauté noire en France en particulier] l’a traité de «Bounty», ce petit gâteau noir dehors, blanc dedans et qui paraphe le titre d’un des chapitres de son deuxième ouvrage : Au-delà du noir et du blanc.
Aujourd’hui, Kelman se sent plus proche de la Corrèze (un département français qui tient son nom de la rivière du même nom) que du Zambèze (fleuve de l’Afrique australe, 2660 Km) et préfère la valse viennoise à la danse dombolo. Pour lui, un Noir n’est rien d’autre qu’un Blanc à la peau foncée. Et de renchérir avec cette boutade : « Je ne me réveille pas tous les matins au son du djembé. Je ne me réveille pas avec sur le visage le crachat qu’a pris mon père colonisé. Je ne me réveille pas le corps meurtri par les coups qu’ont reçus les ancêtres des Noirs américains ou des Noirs antillais. Je voudrais cesser d’être un Noir. Je voudrais être tout simplement un homme ».
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Cette année, cet urbaniste de formation, ancien Directeur de l’Observatoire urbain d’Evry-Courcouronnes (Essonne, France) durant dix ans, récidive avec Parlons enfants de la patrie ; un autre roman dont le titre, cette fois-ci, est conciliateur mais le contenu toujours provocateur. Car aujourd’hui, « qu’on le veuille ou non, le résultat de notre action, ce sont les « Trente Honteuses », avec leur « horreur sécuritaire », l’évolution exponentielle des inégalités, de la pauvreté, le soutien aux régimes corrompus d’Afrique, le paternalisme dominateur soutenu par un humanitarisme professionnalisé ».
Dans ce dernier roman, l’auteur de Je suis noir et je n’aime pas le manioc et Au-delà du Noir et du Blanc s’est donc servi de la description du malaise de la jeunesse française issue de France, d’Afrique et de l’immigration qui s’est exprimé lors des émeutes de 2005 et des manifestations du printemps 2006 pour asseoir sa réflexion en revisitant les slogans libertaires de Mai 68. Tout en dénonçant la démission des adultes, des parents et de l’autorité ainsi que les discriminations faites en fonction de la couleur de la peau ou des ethnies, Gaston Kelman dresse le portrait d’une jeunesse spoliée et apporte des solutions concrètes concernant l’éducation, le logement et l’immigration. Avec cette énième sortie nous espérons qu’il fera encore plusieurs fois le tour de France jusqu’en Outre-mer, comme cela a été le cas pour son premier chef-d’œuvre.

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