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Rose Marie Guiraud «Pourquoi je vis aux Etats-Unis»

Didier Kore | | Danses

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Interview : On la savait affaiblie par la maladie. Aujourd’hui, Rose Marie Guiraud, fondatrice de l’Ecole de danse et d’échanges culturels (EDEC) a recouvré totalement la santé. Dans cette interview téléphonique qu’elle nous a accordée depuis New York où elle réside, Rose Marie Guiraud nous parle des ambitions qu’elle nourrit pour son école et son attachement à son pays la Côte d’Ivoire. Entretien.

Vous êtes basée depuis bientôt 10 ans aux Etats-Unis. Votre état de santé, s’est amélioré. Nombreux sont les Ivoiriens qui aimeraient avoir de vos nouvelles ; alors comment vous portez-vous ?
Je remercie tous les Ivoiriens qui ont une pensée affective pour moi. Je me porte très bien ici à New York, sauf qu’il fait extrêmement froid ici en ce moment.

Qu’est-ce qui justifie cette longue absence hors de votre pays ?
Tout le monde le sait maintenant, je suis malade depuis 1998. Derrière moi, il y a eu le déclenchement de la guerre. Je ne me portais pas très bien et il fallait que je sois quelque part où je peux bénéficier des soins appropriés. Rester dans le bruit pour ce genre de traitement, je crois que cela se révèle impossible avec tout le stress que cela peut causer. Notre pays est notre marchandise, c’est tout pour nous. Donc s’il est bousculé, c’est vraiment malheureux pour nous. J’attends que les choses se rétablissent avant de venir. Mon état de santé est très fragile ; j’attends de venir dans un pays plus apaisé. Cela ne voudrait pas dire que je refuse de me battre comme tous mes frères et sœurs ivoiriens mais que je suis simplement malade, c’est tout.

L’Ecole de Danse et d’Echanges Culturels (EDEC) que vous avez portée à bout de bras traverse une période difficile. Que comptez-vous faire pour la sortir de cette léthargie ?
Je crois qu’à ce sujet, Guillaume Gadji le responsable du Centre fait déjà du bon boulot. Il fut un temps où moi-même j’étais à la tête de cette école. Avec mon état de santé, Gadji qui est un frère que je ne connais même pas s’occupe très bien de l’école. Nos esprits se sont rencontrés comme ça. Il a cru en moi et nous avons décidé de travailler ensemble. Je l’ai connu par l’entremise de l’une de mes belles sœurs. Il est venu à la tête de cette école comme un vrai frère. Il croit en moi et moi en lui. Désormais donc, ma venue est beaucoup plus sûre. Et je crois que je peux venir maintenant la tête haute.

Ce n’est un secret pour personne, la part belle est aujourd’hui faite aux faiseurs de «Coupé-décalé» et autre musique urbaine au détriment des musiques du folklore dans lesquelles vous excellez. Ne craignez-vous pas qu’à cette allure votre école disparaisse ?
Non ! Je salue d’ailleurs même cette floraison de danses et de variétés. Ce qui signifie à mes yeux que la créativité est donnée à tout le monde. Vous convenez avec moi que dans les night-clubs, le «Gbégbé» où l’ «Adjos» qui sont des danses du folklore ne se danseront pas. Partout où il y a les hommes, il faut qu’il y ait de la créativité. Moi, je veux servir de pont entre le village et la ville. Autant il y a le modernisme et les musiques contemporaines, autant il faut faire la promotion de nos valeurs culturelles traditionnelles. La tradition est notre base, c’est notre racine. Il n’y a pas de comparaison à faire. Au même titre que Reine Pélagie chante, Allah Thérèse, la doyenne de la musique ivoirienne a aussi son mot à dire. Il ne faut pas voir le modernisme comme l’ennemi de la tradition. Dans le monde entier, c’est dans la tradition que le modernisme prend sa source. Je demande à tous mes concitoyens de ne pas confiner leur art dans un seul domaine. L’art c’est un tout : la musique, le théâtre, la danse etc. Il n’est pas intéressant de promouvoir un art au détriment d’un autre.

Marie Rose Guiraud continue- t’-elle d’exercer la danse ?
Comment donc ? La danse pour moi, c’est la vie. Cela représente beaucoup pour moi. A ce stade de mon propos, j’encourage l’EDEC à continuer à valoriser nos danses.

En deux mots, quelles sont les ambitions que vous nourrissez pour votre école ?
Bien évidemment, nous allons continuer les échanges culturels. Car cela nous apporte énormement. Si les moyens financiers suivent, nous allons informatiser le centre pour être aussi au rendez-vous de la mondialisation. Nous allons nous équiper d’ordinateurs avec connexion à l’Internet  pour avoir une certaine visibilité sur le monde extérieur. Nous allons aussi apporter de l’espoir à ces jeunes pensionnaires de l’EDEC qui ont été victimes de la guerre qu’a connue notre pays.

Marie Guiraud a-t-elle des souvenirs du pays qu’elle aimerait partager avec les Ivoiriens ?
Il faut toute suite dire que mes enfants me manquent énormement. Les repas qu’on partageait ensemble. En fait, nous formions une grande famille et cela me manque. En son temps, l’on ne fonctionnait pas en termes d’individualité, l’on pensait famille. Quand on n’est pas nanti, il ne faut pas avoir des repas individuels. Cette manière de fonctionner à l’EDEC nous a donné beaucoup d’amis. Certains ambassadeurs et diplomates venaient partager les repas avec nous et cela était vraiment très important pour nous. Aussi faut-il tirer un chapeau aux gouvernants de notre pays qui nous ont laissé faire notre boulot tranquillement. Car, il faut le reconnaître, cela n’est pas le cas partout.

Votre fille Marie Lyn suit parfaitement vos traces. Avez-vous personnellement un plan de carrière internationale pour elle ?
Très bien ! C’est d’ailleurs pourquoi j’œuvre à ce que l’administration de l’EDEC soit mieux organisée afin de l’encadrer au maximum, parce qu’un enfant a besoin d’aide et d’être encadré. Dans ce sens, je voudrais remercier la presse ivoirienne et leur dire de continuer a aider mon enfant. Marie Lyn a tout pris de moi. Elle adore beaucoup la danse et surtout la chorégraphie et j’en suis fière.

Peut-on savoir Marie Rose quand vous ferez votre grand retour ?
Mon retour est dans votre main. Dans la main de tous les Ivoiriens. Il faut bien que je dorme quelque part si je viens et que je n’ai pas à courir du fait de la guerre. Je ne sais plus courir. Mon problème est de pouvoir acheter mes médicaments à temps. Qu’on ne me dise pas que les pharmacies sont fermées du fait du couvre-feu etc. Je suis prête à venir parce que mon village me manque ! J’ai beaucoup d’autres projets à réaliser dans mon pays la Côte d’Ivoire.

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