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L’arbre sans fruit, un film émouvant sur l’infertilité féminine

Cyril Verb | | Cinéma

La réalisatrice Nigérienne Aïcha Macky est porteuse d’un film documentaire dans lequel elle explore un sujet délicat: la fertilité. Dans cette sorte d’autoportrait, elle présente le quotidien de ces « femmes infertiles » au Niger et plus généralement en Afrique.

Mariée depuis quelques années, Aïcha Macky ne connait toujours pas la joie de la maternité. Cette femme proche de la quarantaine – 35 ans – s’inquiète de la situation. Elle inquiète surtout son entourage, son époux en tête. La pression est forte. Et, alors qu’elle échange avec d’autres  dans la même situation, l’idée lui vient de scénariser l’histoire de ces femmes meurtries dans leur chair par le regard de la société.

« En Afrique, chaque femme est un arbre à l’ombre duquel vient se reposer son époux. À qui, elle doit donner des fruits »,  explique-t-elle dans un extrait de la bande d’annonce de « L’Arbre sans fruits ».

La réalité, c’est celle-ci. Quand un couple est confronté à un problème d’infertilité, tous les regards se tournent ainsi vers l’épouse. Au-delà d’Aïcha, c’est donc une question sociétale. La réalisatrice l’a bien compris. « Mon film part du singulier mais va finalement vers le général, et touche de nombreuses femmes à travers le monde » asserte-t-elle.

Le documentaire est en langue Haoussa avec un sous-titrage. Mais, cela n’altère en rien la beauté du film. Facile à comprendre d’ailleurs. Il présente les différentes gymnastiques que sont obligées de faire les femmes pour régler ce problème d’infertilité dans leur couple. Visite chez le médecin, le religieux, le marabout…

En face, les époux n’envisagent pas que le problème puisse venir d’eux, même dans une société dite moderne. « Tout homme qui est à mesure de faire une érection va dire qu’il est puissant, qu’il est normal », résume le médecin dans une séquence du documentaire. Dans un contexte pareil, « on voit que bien souvent, il est plus facile de demander à un homme d’attraper un lion ou de décrocher la lune que d’aller faire un spermogramme », déplore la réalisatrice.

Le film est parlant, émouvant. Les femmes expliquent face caméra leurs souffrances. Ces « arbres sans fruits » finissent par être terrassés par le regard de la société, l’arrivée d’une ou plusieurs co-épouses. Elles perdent confiance en elles, perdent l’estime de soi et deviennent à la limite des renégates de la société.

Si « l’infertilité se conjugue – encore- au féminin » en Afrique, Aïcha Macky veut changer le regard sur la question à travers ce documentaire récompensé du trophée de l’intégration au festival de Blitta au Togo.

 

Cyril Verb