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Bruce Clarke et la fonction sociale de l’art

Abissiri Fofana | | Arts Visuels

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Né en 1959, à Londres après des études aux Beaux-arts à Leeds University, Grande-Bretagne, Bruce s’installe en France. Plasticien et photographe, il expose depuis 1989 en France et à l’étranger. Son travail plastique traite de l’histoire contemporaine, de l’écriture et de la transmission de cette histoire. Mais c’est aussi un art qui prend l’engagement d’avoir une fonction sociale.

Le propos consistant à faire de l’art un mystère est très ancien. L’art – Marx Ersnt s’en est déjà moqué- a été élevé au rang de religion, l’artiste au rang d’élu, l’idée artistique au rang de grâce. C’est sous ces auspices que l’art s’est accompli, situé loin des réalités sociales ; perdant ainsi sa fonction sociale. Bruce Clarke  dont les œuvres sont sur les cimaises de l’IUFM de Rennes depuis le 12 novembre et ce, jusqu’au 04 décembre prochain,  rompt avec cet idéalisme esthétique aussi périlleux qu’ambigu.  Son  œuvre est un regard sur le monde qui nous entoure. Il la conçoit comme un moyen de s’exprimer et d’informer afin de peser sur le cours de l’histoire. Sa peinture, qui est un ensemble de collage, de journaux,  des images de résistance, avec une palette de couleurs sobres est un « bolchévisme culturel » dans le sens où la peinture de Bruce Clarke est engagée dans…le réel
De fait, personne  ne pratique d’une façon aussi criante la thèse selon laquelle toute activité artistique est la production d’une réalité et non l’imitation de la réalité.  Pour Bruce Clarke cette réalité est celle de l’époque et de l’environnement dans lequel il vit. A ce propos voici ce qu’il disait aux confrères de Radio France Internationale en 2002 :
« Plastiquement, je pars de fragments déchirés, de papiers divers, de journaux, d’affiches, et je les travaille, les triture, les imprègne de couleurs. Mots et couleurs, mots et images s’intègrent alors et se recomposent sur la toile. Comme on peut le voir, la matière première : les textes imprimés, les morceaux de journaux et les types d’écrits sont identiques à ceux que l’on trouve en France. Mêmes affiches de films, mêmes tracts politiques. Mots et textes n’ont pas forcément de lien immédiat avec les images, les uns n’illustrent pas les autres, je ne commente pas, je recompose à partir d’une ‘mise à plat’ de la figure. Les documents sont issus d’un certain contexte qui explicite aussi la place des media, de la presse, des images télé et tout ce qui nous assaille journellement et ils se trouvent ensuite transformés et replacés dans un autre contexte qui est avant tout une toile montée sur châssis.
Dans un sens les fragments trouvés et choisis sont d’abord ‘décontextualisés’ pour redonner du sens qui n’est pas forcément le sens originel. Il y a comme transfiguration, déplacement. Je déconstruis pour « ré figurer » et cela passe par ma sensibilité et mon travail. Je me mets en situation d’intermédiaire, de « médium » pour assurer et assumer le passage, une quête passe par moi et j’en suis l’instigateur. Une quête qui rétablit le lien social pour donner à l’art une fonction dans la société.  Une manière de faire un pied de nez au mirage illusionniste qui veut que l’art soit éloigné de la réalité. Chez Bruce Clarke, l’art est une activité responsable où l’artiste joue un rôle et non une société où l’artiste mène la vie exclusive d’un marginal ou d’un privilégié.

Sud-africain d’origine, très tôt engagé dans la lutte anti-apartheid, Bruce Clarke est installé à Paris depuis une quinzaine d’années, après avoir longtemps vécu à Londres où il est né en 1959. Il  fabrique des œuvres complexes en rapport immédiat avec la situation postcoloniale du continent africain. Il y associe éthique et esthétique. Lieu de rencontre et d’échange, Paris, selon lui, accompagne son interrogation sur le monde et les hommes, bien que la liberté du créateur y soit, comme ailleurs, sans cesse mise en danger. Malgré des amitiés profondes, entretenues en cette terre française, Bruce Clarke, dont le travail de mémoire sur le génocide des tutsis a été salué par la critique internationale, se considère avant tout comme une sorte de citoyen, du monde.

Photographe, Bruce Clarke a signé aussi son livre « Les Naufragés du Temps » à Saint-Malo le 13 novembre dernier.

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