Ndoye Douts : Quand la magie des couleurs s’éteint !
Le monde de l’art pleure la perte de Ndoye Douts depuis ce 9 juin 2023, un talentueux plasticien sénégalais aux œuvres éclatantes de vie et de créativité. À travers ses toiles vibrantes, Douts capturait l’âme bouillonnante de Dakar, offrant une vision unique et captivante de la vie urbaine africaine. Son décès à l’âge de 50 ans laisse derrière lui un héritage artistique marqué par sa générosité et sa finesse.
« Il y avait de la gravité, derrière l’apparente naïveté et le trait enfantin » cultivés par Ndoye Douts, cet artiste plasticien sénégalais dont la disparition a laissé un vide immense. Major de sa promotion en 1999 à l’École nationale des Beaux-Arts du Sénégal, il était animé d’une passion inextinguible pour le « désordre architectural » de Dakar, sa ville natale. À travers ses installations, il offrait un regard unique sur la ville, et ses séries de dessins témoignaient de l’intensité urbaine qui caractérise le continent africain.
Récemment rentré d’une exposition au Japon, où son travail avait été chaleureusement accueilli, Ndoye Douts semblait fatigué. Son ami Olivier Sultan, propriétaire de la Galerie Art-Z à Paris, se souvient de ses œuvres qui représentaient à merveille l’effervescence perpétuelle de Dakar. « Ses toiles, ses dessins, ses films d’animation… Tout était un kaléidoscope urbain où se mêlaient la mer, les pirogues, les voitures, les immeubles et les gens. Il capturait l’énergie bouillonnante de sa ville avec une maîtrise plastique singulière », confie Sultan.
Ndoye Douts, dont les origines remontent à une ethnie de pêcheurs influente à Dakar, plaçait souvent le mot « lébou » sur ses toiles, où poissons et embarcations occupaient une place prédominante. « La raréfaction du poisson expliquait le phénomène des départs des migrants en pirogues, un voyage dont beaucoup ne sont jamais revenus », explique Sultan. Mais au-delà de sa thématique, Douts abordait des sujets profonds avec une joie de vivre contagieuse. Généreux dans ses relations, il soutenait activement ses pairs artistes, arborant fièrement les créations de son ami Cheikha Sigil et n’hésitant pas à les faire découvrir aux autres.
Pour le photographe sénégalais Mabeye Deme, fervent admirateur du travail de Ndoye Douts, la première rencontre avec ses œuvres à la Fondation Blachère fut un choc artistique. « D’un coup, un trait sur la toile, et puis Dakar surgissait avec ses taxis imposants, ses petits lampadaires et ses minuscules personnages. C’était une véritable lecture de la ville, reflétant à la fois ses problèmes de circulation et de pollution, mais aussi sa vitalité », raconte-t-il. Les embouteillages à Colobane ne seront plus les mêmes pour Deme, qui ne pourra s’empêcher de voir les tableaux de Douts à travers son objectif. Il compare d’ailleurs la proposition artistique de Douts à celle du regretté cinéaste Djibril Diop Mambéty, dont les films offraient également une vision unique de Dakar.
Ndoye Douts était un artiste d’une grande bienveillance et d’une joie de vivre communicative, comme en témoigne le réalisateur français Christian Lajoumard, qui a réalisé un documentaire sur lui. « Il aimait les stylistes et changeait de tenue en permanence, semblant être un bouquet de fleurs vivant. Il était profondément attaché à son quartier, la Gueule Tapée, et nous allions souvent à Soumbedioune pour contempler la mer, un lieu qu’il affectionnait particulièrement », partage Lajoumard.
Ainsi, bien que Ndoye Douts soit « parti », ses œuvres demeurent, témoignant de son regard libre et unique qui fait de Dakar une ville à part.
Innocent KONAN
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